"Gardien ?"
"Uatu, X-51."
"Pardon, je suis un peu perdu. Je me souviens de Spider-Man. Il avait l'habitude de plaisanter dans les moments les plus délicats. Alors, je suppose que si, un jour, il a décidé de raccrocher et de laisser le monde se débrouiller sans lui, ce n'est pas très étonnant."
"Tu juges vite, X-51. Tu ne devrais pas juger d'après le peu de choses que tu as vues. Il y a tellement à découvrir encore sur la vie de Spider-Man. Par exemple, tu n'as pas..."
"Okay. Okay. Je vais peut-être trop vite en besogne. Mon père me le disait aussi. Il disait que c'était un de mes plus grands défauts d'homme. Moi, je prenais ça pour un compliment. J'en oublie ce que je voulais te demander... Ah oui, Captain America ! Si quelqu'un incarnait la grandeur d'âme, l'espoir et la persévérance devant des obstacles apparemment insurmontables, c'est bien lui. Alors, comment ce que j'ai vu a-t-il pu arriver ? Et la façon dont ses amis le traitent... C'est une véritable légende et eux le considèrent comme un fardeau !"
"X-51. Il ne faut pas toujours voir l'avenir par rapport au passé. Ce que tu vois aujourd'hui ne se limite pas à ce que tu connais. Le passé est une référence qui permet de comprendre en partie le présent. Et l'avenir n'est jamais ce que tu crois."


"Mais comment Cap en est-il arrivé là ? Comment un homme peut-il changer à ce point ?"
"Les hommes ne sont pas de marbre, X-51. Ni d'acier. Ils ne sont que poussière, que de l'argile modelée par les mains de l'expérience. Pense au contexte dans lequel il vit, X-51. Qu'est-ce qui a changé en vingt ans ? Regarde l'Amérique et dis-moi ce que tu vois."

"L'AMERIQUE DU PRESIDENT OSBORN"

"Je vois... une foule qui panique. Je vois la famine... les pillages... des gens qui tuent pour se nourrir... Enfin, je vois la paix. Pourquoi toute cette misère, Uatu ?"
"Tu as des yeux pour voir, X-51. A toi de me le dire. Que font les autorités du pays ?"
"Je ne comprends pas. Le Congrès est vide. La Maison-Blanche est barricadée. Washington D.C. est un bidonville. Et pourtant, la vie économique se maintient. Avec Osborn Industries notamment. On dirait que cette société contrôle tout."
"Norman est donc enfin devenu le Bouffon Roi."
"Que veux-tu dire, Uatu ?"
"Norman Osborn est un meneur d'hommes, X-51, et en même temps un prédateur qui se nourrit de ses semblables. Il a caché son besoin de pouvoir derrière l'image d'un grand industriel. Comme il a caché son visage derrière le masque du Bouffon Vert."
"Le Bouffon Vert ? Je croyais qu'il était mort."
"Peut-être, X-51. Peut-être. Que vois-tu d'autre ?"
"Je vois des greniers vides et beaucoup de gens qui font la queue pour avoir de la nourriture. Ils font la queue devant Osborn Industries. Une fois qu'ils ont mangé, ils retournent travailler, chez eux ou dans les bureaux d'Osborn Industries. On dirait que tout et tout le monde appartient à Osborn. Mais c'est impossible. Je vois... le rouge, le blanc, le bleu et..."
"Le vert... X-51. C'est un monde d'abondance. Un monde de richesses, oui. Mais un monde qui a encore quelques imperfections. Le manque d'argent. Le manque de confort. La suffisance."
"Mais ce n'est pas juste."
"C'est la loi du laissez-faire, X-51. Une règle d'or qui règne depuis toujours. Quand l'un gagne, tous les autres perdent. La démocratie a toujours été pour l'Amérique un moyen de se suicider."
"... Mon père disait que l'Amérique est comme un arbre géant qui s'arrêterait de pousser si on ne soignait pas ses racines. Il disait que l'arbre de la liberté est le symbole de la liberté. Et que, pour atteindre au bonheur, les gens étaient prêts à couper la branche sur laquelle ils étaient assis plutôt que de reconnaître qu'il est plus important de préserver sa liberté."
"Ton père est mort, X-51. Les vers ont dévoré ses paroles. Ne te raccroche pas à elles. Tu as oublié ce que je t'ai dit sur le bien et le mal."
"Comment peux-tu me dire ça ? J'aime mon père. C'était la personne qui comptait le plus au monde pour moi. Je lui dois tout. Comment peux-tu être aussi cruel ?"
"X-51 ... As-tu bien regardé tout ce que je t'ai montré ? Tu crois que la vie est cruelle. Que la lutte est cruelle. Mais il n'y a pas de cruauté dans tout ça. La cruauté implique un impératif moral qui n'existe pas. Regarde ce qui est arrivé à ton père. Il est mort en te protégeant contre ceux que tu étais destiné à servir, parce qu'il croyait que c'était la meilleure chose à faire. La moralité est cruelle, X-51. Mais moi, je ne le suis pas. Et c'est cette moralité qui, en fin de compte, a détruit Captain America."
"Mais même si tout dépend d'Osborn Industries, Cap, lui, ne représente-t-il plus le rêve américain ?"
"Quelle partie du rêve, X-51 ? Les hommes ne sont pas égaux et ne le seront plus jamais. La seule chose en quoi Rogers croyait lui a été enlevée. Son dieu est mort. Steve Rogers a longtemps été le représentant d'une certaine population. Comment pourrait-il redevenir ce qu'il a été quand cette population n'existe plus ?"
"Mais... et ses amis ? Même si les Vengeurs sont morts, d'autres peuvent l'aider, non ?"
"Regarde-les bien."

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